De l’abricot du roussillon à sept euros cinquante la cagette, du perlé à point, du petit boulé, de la fraise à papy, de l’aigrette du cantal, du hasard de promenade, du tamis de nylon, du petit filet, du lissé, du bien dosé, de l’étiquette à l’encre violette, du pèse-sirop, de la recette de myrette tiano, de la pomme chapardée, du melon rouge gorge, une tentative à la carotte, une tentation à l’ananas, du perlé, du cassé, des trois fruits rouges, de la casserole en cuivre, de la cuillère en bois, du petit carré de cellophane, de la louche, du dénoyauteur, du citron pas traité, de la groseille du jardin, de la boule molle, de la boule plus dure, du sureau du chemin, du bol d’air, de la groseille à froid, de la petite éponge rectangle, du nappé, du soufflé
Et dans le pot de confiote comment se fait-il qu’en de si bonnes choses qui y sont, un jour vers 7 heures du mat ou 16 du tantôt on y découvre moisissures, comment que ça se fait ça, mal fait ça, que du pourri, il faut bien le dire tel quel, vient là où que des bonnes choses il y a ? que de l’altération jusqu’à la putréfaction, du déni jusqu’à l’horreur naissent là où sont que des fraises et du sucre cuits à la bonne température et au juste temps du perlé ? ça c’est un beau jour qu’on se dit tel quel telles choses et un autre jour qu’on est dans la vie comme une limace sur la côte du ventoux, on se dit mais oui c’est sûr l’homme est comme la confiote, il peut très bien être le pire du pourri là même où il est d’ordinaire si bon et tant bien sucré
La confiote est un bout d’existence au bout d’exigences, elle est au bout de l’artisanat forcené et fanatique, entêté et incessant et désintéressé de la nature, elle est de la nature qui trouve une nouvelle nature après le petit artisanat tranquille pépère de l’homme, la nature disparaît en même temps que le fruit dans la confiote, les pensées du fruit fléchissent, s’en vont, son avenir cède brutalement la place à la première seconde de la cuisson, ses yeux se ferment et ne voient plus et c’est à peine si on remarque qu’une large grimace barre le peau du fruit, c’est que nous sommes occupés à autre chose, emplis que nous sommes de l’avenir radieux et durable que nous offrons là à la poire william dont la vie sans nous serait si courte, ah là là !
Tu me dis yes et te lèches un index mis en confiote, je te dis yes et voilà que je te pourlèche le susdit, tu l’y replonges et te le repourlèches puis m’en régales derechef, et j’y vais d’un mien, te le tends, tu le prends, y liches le bout d’abricot, tu me dis hum ! et le happes tout de go, je te dis oh ! le récupère, le remets en confiote et me le bouffe aussi sec, tu dis oh, je t’en laisse, te le donne, tu le suçotes, ne m’en laisses goutte, je te dis oui, tu me dis oui, nous y allons de concert, nous nous y touchons dans la régalade, la rigolade, je t’en orne un bout de nez, tu m’en flanques au menton, et tu ris, et je ris, et tu te le happes et je me le happe, puis tu finis le mien et puis et tout et tout tandis que dehors, là, juste derrière la fenêtre, les cerises rougissent
C’est clair et net et simple comme un bonjour, pour faire de la bonne confiote il faut mélanger de bonnes choses, pas n’importe quelles bonnes choses, des bonnes choses qui vont bien ensemble, qui forment un bel ensemble à confiote, la confiote est le modèle, l’archétype, sont ainsi des mélanges de gens qui font et sont de la confiote, des alliances de circonstances qui font et sont de la confiote, des mixtions de lieux et de temps qu’il fait qui font et sont de la confiote, il y en a plein plein plein de choses et d’autres et d’autres qui font et sont de la confiote, de la confiote pour soi, de la confiote pour les autres, de la confiote pour les hommes, les femmes, les enfants, les éléphants et aussi pour les caïmans qui eux aussi aiment beaucoup la confiote
La confiote c’est une histoire comme dans la préhistoire, c’est du b.a.-ba de parlé, du babil, du langage de poisson, du verbe d’herbe, on laisse la confiote qu’on a faite derrière nous comme dans la préhistoire on a laissé l’empreinte de nos mains et les petits chevaux de tarquinia et les taureaux de lascaux, c’est comme un souffle prompt qui reste attaché à notre personne et que d’autres reçoivent et écoutent et goûtent, comme le chant d’une fontaine dans la colline, comme la maison aux lumières douces, la journée s’ouvre pareille à une grotte sur le flanc d’un mont et la confiote vient raconter son histoire qui dit que nous sommes passés par là nous aussi, que nous avons cueilli, avons pesé, nous sommes appliqués, bon p’tit déj !
Le petit sachet de mousseline ou de gaze dans lequel on met les pépins, le nouet dans lequel on les noue, les pépins qu’on ne supprime pas mais qu’on met dans de la gaze afin que ça prenne, sans les pépins ça ne gaze, c’est loupé bel et bien fichu, on les met, on ne les omet
les pépins
faut pas faire comme si les pépins n’existaient pas, faut pas garder que le meilleur pour que ça prenne, faut se souvenir des pépins et les mettre dans de la gaze pour que ça gaze, faut se souvenir de tout y compris des pépins, pas que se souvenir que des bonnes choses, la confiote est le principe de notre propre petite fabrique perso, y’a qu’à faire de la confiote pour savoir l’essentiel qui est l’indispensable